Le rêve d’une Afrique fédérale
L’Afrique est un continent riche et diversifié, qui compte 55 pays et plus d’un milliard d’habitants. Depuis les indépendances, plusieurs initiatives ont été lancées pour renforcer l’intégration régionale et continentale, avec des objectifs et des modalités variés. Dans cet article, nous allons présenter les deux principaux projets d’union africaine qui ont marqué l’histoire du continent : l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA), fondée en 1963, et l’Union Africaine (UA), lancée en 2002. Ces deux projets ont des similitudes, mais aussi des différences, ainsi que des critiques et des limitations propres à chacun. Nous allons également évoquer le projet des États-Unis d’Afrique (EUA) ainsi que le rêve d’une Afrique fédérale, qui anime certains leaders et penseurs africains.
L’Organisation de l’Unité Africaine
L’OUA a été la première institution continentale africaine, créée dans le contexte de la décolonisation et de la lutte contre l’apartheid. Son objectif principal était de promouvoir l’unité et la solidarité des États africains, de défendre leur souveraineté et leur intégrité territoriale, et d’éradiquer toutes les formes de colonialisme en Afrique. L’OUA a joué un rôle important dans le soutien aux mouvements de libération nationale et dans la coordination des positions africaines sur les questions internationales. Cependant, l’OUA a aussi été critiquée pour son manque d’efficacité dans la résolution des conflits internes au continent, pour son respect excessif du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États membres, et pour son incapacité à répondre aux besoins socio-économiques des populations africaines. L’OUA a également souffert de problèmes financiers, institutionnels et politiques, qui ont limité sa capacité d’action et sa crédibilité.
L’Union africaine
L’Union africaine (UA) est l’organisation politique et économique qui regroupe les 55 pays du continent africain. Elle a été créée en 2002, en remplacement de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), fondée en 1963. L’UA est née du constat de la nécessité de réformer l’OUA et de l’adapter aux nouveaux défis du XXIe siècle. L’UA se veut plus ambitieuse que l’OUA et a pour objectifs de promouvoir la paix, la sécurité, la démocratie, les droits de l’homme, le développement durable et la coopération entre les pays africains. Elle dispose de plusieurs organes, dont l’Assemblée des chefs d’État et de gouvernement, la Commission de l’Union africaine, le Conseil de paix et de sécurité, le Parlement panafricain, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, etc. L’UA a également mis en place des mécanismes de coordination avec les communautés économiques régionales (CER), qui sont des regroupements sous-régionaux de pays ayant des intérêts communs. Parmi les CER les plus connues, on peut citer la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), etc.
L’UA a également lancé des projets phares pour accélérer la croissance économique et le développement du continent, tels que le réseau intégré de trains à grande vitesse, la zone de libre-échange continentale africaine, ou encore le passeport africain.
Néanmoins, l’UA n’est pas exempte de critiques et de limitations. Certains lui reprochent d’être trop influencée par certains États membres ou par des partenaires extérieurs, d’être trop bureaucratique et centralisée, ou encore d’être trop éloignée des réalités et des aspirations des peuples africains. L’UA doit également faire face à des obstacles financiers, logistiques, sécuritaires et politiques, qui entravent la mise en œuvre effective de ses décisions et de ses programmes.
Les États-Unis d’Afrique : Une utopie fédéraliste ?
Les États-Unis d’Afrique (EUA) sont un projet plus ambitieux et plus controversé, qui vise à créer une fédération politique et économique entre tous les pays africains. L’idée d’une union plus étroite entre les pays africains remonte à la période des luttes anticoloniales, portée par des figures comme Kwame Nkrumah, le premier président du Ghana indépendant, ou Cheikh Anta Diop, le célèbre historien et philosophe sénégalais. Le projet a été relancé en 2007 par le colonel Mouammar Kadhafi, alors dirigeant de la Libye, qui a proposé de transformer l’UA en EUA lors du sommet de l’organisation à Accra, au Ghana. Selon Kadhafi, les EUA seraient dotés d’un gouvernement fédéral, d’une armée commune, d’une monnaie unique et d’un passeport panafricain. Le projet a suscité des réactions mitigées parmi les dirigeants africains, certains y voyant une opportunité historique de réaliser l’unité du continent, d’autres craignant une perte de souveraineté nationale ou une domination de certains pays sur d’autres. Le projet n’a pas abouti à ce jour, mais il continue d’être défendu par certains acteurs politiques et sociaux.
Le rêve d’une Afrique fédérale est une vision plus lointaine et plus idéaliste, qui imagine un continent uni sous une même entité politique, respectueuse de la diversité culturelle et linguistique des peuples africains. Ce rêve s’inspire des modèles fédéraux existants dans le monde, comme les États-Unis d’Amérique ou la Suisse. Il repose sur l’idée que l’Afrique a une identité commune, forgée par une histoire millénaire et par des défis communs à relever face aux enjeux globaux. Il suppose également que les Africains sont capables de dépasser les clivages hérités des colonialismes et du néocolonialisme, qui ont divisé le continent en frontières artificielles et en zones d’influence. Le rêve d’une Afrique fédérale est porté par des intellectuels, des artistes, des activistes, des jeunes, qui croient en la possibilité d’une Afrique unie, forte et prospère.
En conclusion, nous avons vu que les deux projets d’union africaine qui ont marqué l’histoire récente du continent sont l’UA et les EUA, qui ont des objectifs et des modalités différents. Nous avons également évoqué le rêve d’une Afrique fédérale, qui est une vision plus lointaine et plus idéaliste. Ces projets et ces rêves témoignent de la volonté des Africains de renforcer leur intégration régionale et continentale, pour faire face aux défis du XXIe siècle.
SOURCES
Organisation de l’Unité Africaine (OUA) :
Livre: “African Diplomacy and the Quest for Stability” par Adekeye Adebajo.
Article académique: “The Legacy of the OAU” par Gilbert Khadiagala dans le “Journal of Modern African Studies.”
Union Africaine (UA) :
Livre: “The African Union: Legal and Institutional Framework” par Abdulqawi A. Yusuf.
Site web officiel de l’Union Africaine pour des informations officielles sur son fonctionnement et ses initiatives.
Projets d’intégration africaine :
Livre: “The African Union’s Africa: New Pan-African Initiatives in Global Governance” par F. Wafula Okumu.
Article académique: “Assessing the Effectiveness of African Regional Economic Communities in Promoting Regional Integration” par Elizabeth Sidiropoulos dans le “African Development Review.”
États-Unis d’Afrique et Afrique fédérale :
Discours de Kwame Nkrumah, premier président du Ghana, sur les États-Unis d’Afrique.
Livre: “Africa’s Peacemakers: Nobel Peace Laureates of African Descent” par Adekeye Adebajo.
Histoire de l’intégration africaine :
Livre: “Africa’s Peacemakers: Nobel Peace Laureates of African Descent” par Adekeye Adebajo.
Article académique : “The Evolution of Regionalism in Africa: From OAU to AU” par Chris Landsberg dans le “African Journal of International Affairs.”
Livre: “The Making of African Union: Origins and Value of an Idea” par Bethwell A. Ogot.
Analyses contemporaines :
Site web de la Brookings Institution (section Africa) pour des analyses politiques actuelles.
Site web de l’Institute for Security Studies pour des rapports et des analyses sur les questions de sécurité en Afrique.
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